lundi 25 juin 2007

Montreal blues

"Au moins tu seras contente, tu ne vas plus la voir pendant un an !"

Voilà, tout est dit. Je suis à un mois et demi de m'embarquer pour l'autre bout de la planète, encore empétrée dans un mémoire qui me révulse et tracassée par des histoires de paperasserie qui n'arriveront à terme qu'avec l'opération du Saint-Esprit. Et on croit que je suis ravie de me casser, comme une adolescente fugueuse en mal de sensations fortes...

C'est vrai que ça fait un an que je ne rêve que de revoir les rives du Saint-Laurent, et j'admets avoir épuisé plus d'une personne avec mes gérémiades sur la qualité de vie, les moments exquis et le monde merveilleux qui se cachent à l'ombre du Mont-Royal. Je sais que j'ai pu paraître égoïste, et donner l'impression de ne pas m'attacher. Mais la vie ici compte bien plus pour moi que je ne le laisse paraître. Ma famille, mes amis... tous ceux qui sont mes racines et mon entourage, mon soutien et ma force, comment pourraient-ils s'imaginer que cela ne m'arrache pas le coeur de partir loin d'eux ? Je ne suis plus aussi sûre, là, maintenant, de mon choix de m'expatrier. J'aimerai juste me coucher et hiverner toute une année, pour ne pas avoir à choisir entre ce que je suis, et ce que j'aspire à devenir. Je croyais qu'en banalisant cette année qui s'annonce, en faisant semblant de croire que c'est normal de partir chercher ailleurs ce qu'on n'a pas chez soi, en jouant à "On dirait que je partais et qu'on ne se rendait compte de rien", tout se passerait sans larmes. Et me voilà comme une idiote à ruminer mon chagrin... Il faudrait arrêter de penser à tout ça, arrêter de se raconter des histoires tristes qui rendent malheureux, mais là, je ne sais plus très bien ce qui m'attend de l'autre côté du chemin. Je sais que le monde que je retrouverai dans un an ne sera plus celui que je quitte aujourd'hui. La planète ne s'arrêtera pas de tourner, et je ne suis plus aussi sûre de ce que je serai capable d'affronter.

C'est vrai que les Français qui ont goûté au Québec se retrouvent souvent le coeur coincé entre les deux rives, amputés d'une partie d'eux-mêmes où qu'ils décident de s'installer. Et ce soir, on dirait qu'il me manque bien plus qu'une partie de moi-même...