mardi 12 février 2008

La loi de la non-adaptation

C'est amusant. Je croyais que venir dans un pays, pas juste pour des vacances, mais pour y habiter vraiment, y vivre même, ça impliquait de se mettre au diapason de ce pays. Sans vouloir à tout prix faire étalage de ma merveilleuse volonté d'intégration, j'en suis arrivée à dîner à midi et à souper à 18h30 voire 19h devant le Téléjournal de Radio-Canada, avant de vaquer à mes occupations de la soirée. Le rythme normal pour un Québécois. J'avoue avoir mis quelques mois à avancer de trois heures mon horloge interne.

Mes colocs, non. C'est simple, je rentre à l'appartement, et je m'étonne parfois de ne pas voir la tour Eiffel par la fenêtre. Outre le reblochon qui dort au frigo, l'acharnement qu'ils ont à acheter du lard pour en faire des lardons et à rechercher de l'ersatz de beurre salé à 7000 km de la moindre vache normande me sidèrent. Mais le pire, le pire du pire, c'est la télé.
Imaginez : vous habitez de l'autre côté de l'océan, chez des descendants de colons qui ont quitté le Vieux Continent il y a de ça 400 ans. Vous passez vos journées en pleine Amérique du Nord, noyée dans un accent que vous finissez par ramener avec vous dans le métro. Il fait -25°C dehors. C'est plein de neige, de glace, de sloche. Ca fait des années que vous avez oublié à quoi ressemble une Twingo, parce qu'ici, il n'y a aucun modèle en dessous du Dodge Caliber ou presque. Bref, vous êtes à Montréal, stie !

Vous arrivez harassée de votre longue journée et qui vous accueille ? Nagui, Julien Lepers ou Tex, selon l'heure. Mes colocs, Français installés à Montréal depuis plus de 7 ans pour l'un, et depuis bientôt deux ans pour les autres, ne regardent exclusivement que TV5. C'est-à-dire les émissions de France 2-France 3 et les documentaires de France5. Et quand j'ai le bonheur d'allumer la télé, de tomber forcément sur TV5 et de trouver un documentaire sur les lieux insolites de Montréal, je me fais (mais sérieusement !) traitée de folle.
Je ne parle même pas des séries locales et des jeux télévisés qui soutiennent la comparaison, mais qu'ils trouvent débiles. Le seul film québécois qu'ils ont du voir, c'est le déclin de l'Empire américain. Et quand on leur demande de citer le nom d'un théâtre de Montréal, qui doit compter au moins 40 salles très connues, j'ai droit au Rideau-Vert. Bel effort.

Tu m'étonnes que les Québécois que je rencontre pour la première fois se sentent obligés de me traduire ce qu'est un party et d'articuler quand ils parlent. Je pensait qu'ils me prenaient pour une andouille. Mais non, ils me prennent juste pour une Française.
Je leur donne encore deux ans pour nous détester. Il est grand temps que je pogne l'accent et que je me fonde dans la masse.

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Non ! STP ! Ne te fonds pas dans la masse ! pas toi ! pas June !
Les cinés quebecois affichent-ils "Bienvenue chez les ch'tis" (cinéma d'art et d'essais ?) Chez nous en France, salles bondées, embouteillages sur les parkings de ciné... film sympa sur la simplicité ch'ti. Bref, la connerie française ne serait-elle pas une connerie parisienne ?

J. a dit…

Non, pas de trace de poussière lilloise, le jouale gagne encore par k.o. contre le ch'ti !